TL4 La Bruyère
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La Perception, cours explicité

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Message  Cécile Jeu 21 Oct - 17:49

LA PERCEPTION

APPROCHE PROBLEMATIQUE

DEFINITION ETYMOLOGIQUE
Le terme « perception » vient du latin « percipere », qui signifie saisir par les sens. Il y a donc dans la perception l’intervention de la sensibilité, qui concerne les choses extérieures.

Puisqu’il s’agit de sentir, je peux établir une distinction entre la perception et :
- l’imagination, qui est la production de quelque chose existant virtuellement, or la perception, effectuée par les sens, suppose la présence concrète de ce qui est perçu.
- la mémoire, qui est la capacité à se rappeler le passé, car la perception se rapporte à quelque chose de présent.
- la sentiment : il y a bien un ressenti, mais celui de choses extérieures et non intérieures à soi.

DOUBLE ASPECT : REALITE ET SUBJECTIVITE

Un mode d’accès à la réalité
La perception est tout d’abord une manière d’être en rapport avec une réalité préexistante, extérieure à la conscience, qui existe avant que je ne perçoive.

Une façon d’être affecté par quelque chose d’extérieur
Mais c’est aussi la façon dont cet élément extérieur va m’affecter, me modifier.
La perception est donc à la fois objective et subjective, puisqu’elle est relative à un ressenti personnel. Il se crée une sorte de tension entre ces deux aspects antithétiques.

PROBLEMES POSES
La perception est donc relative au sujet, mais se réduit-elle à l’enregistrement passif de données sensibles ?
-> Percevoir, est-ce sentir (-> réceptivité passive) ?
-> Le sujet percevant est-il passif, simple capteur de données objectives, ou actif, avec une intervention du sujet par le biais d’un traitement de ces données ?

A ce sujet, deux thèses s’opposent :
• la thèse de l’empirisme, courant plutôt anglo-saxon, et selon laquelle la perception se résume à la sensation, c’est-à-dire à l’expérience qu’a le sujet du monde sensible.
• La thèse du rationalisme, courant plutôt continental, qui veut qu’il y ait traitement des données sensibles par une structure interne du sujet.

PERCEVOIR, EST-CE SENTIR ?

THESE DE L’EMPIRISME : LA PERCEPTION SE REDUIT A LA SENSATION
Ce courant fut initié au début du XVIIème siècle par John Locke et Thomas Hobber, puis fut repris par David Hume.
DEF : l’empirisme est une doctrine pour laquelle toutes les notions proviennent de notre expérience sensible, de notre contact avec une réalité externe. Elle accorde donc aux sens une place prépondérante dans la connaissance.

QU’EST-CE-QU’UNE SENSATION ?
Une impression sensible
DEF : une sensation est une réaction de notre sensibilité à un stimulus externe.
Il ne s’agit donc pas d’une copie qui s’apparenterait à une photographie d’une donnée de notre environnement, mais bien une réaction biologique.
C’est une réaction plus qualitative que quantitative, en ce sens qu’elle repose sur la distinction de deux données opposées : un plat est ainsi chaud s’il n’est absolument pas froid, sucré s’il n’est absolument pas salé…
Cette analyse qualitative suppose une hétérogénéité des sensations dans le ressenti, puisque=’une sorte de comparaison est possible.

Possible intensité donc quantifiable
La sensation peut mesurer l’intensité d’une donnée, ses degrés, et le danger qu’elle peut représenter. Entre en effet en jeu l’instinct de survie, qui peut faire interpréter les sensations comme des signaux, des avertissements du danger, si par exemple un plat est chaud de façon trop intense.

Une simple traduction des stimuli sous forme de signaux
Ces signaux vont être interprétés grâce à l’expérience, qui est dans un 1er sens l’enseignement donné par la sensibilité. Le sujet est donc relativement passif, touché et affecté par données externes sans intervention personnelle, comme une corde qui vibre lorsqu’on la pince, sans qui n’y ait aucune activité propre de la corde.
L’environnement serait donc la seule cause de la perception.

UNE COLLECTION DE SENSATIONS
DEF : une collection de sensations, selon John Locke (1632-1704) qui est à l’origine de cette théorie, est un ensemble de sensations qui s’aggloméreraient, s’agenceraient sans construction mentale.

Pour Locke, la « grande source de la plupart des idées que nous avons dépend entièrement de nos sens, et le communique par leur moyen à l’entendement » est la sensation. On peut tirer deux conclusions révélatrices de la théorie de Locke de cette citation :
- il y a connexion directe entre la sensation et l’ « entendement », c’est-à-dire la faculté de comprendre, de juger. Il n’y a aucune construction mentale qui effectuerait l’agencement de données sensibles.
- la perception se résume à cette collection de sensations.

FAILLES DE LA THESE EMPIRISTE
• certaines sensations ne sont pas fournies par l’extérieur.
Exemple de la douleur :
A partir d’un certain nombre de degrés, la sensation de chaleur devient douleur, et la chaleur ne sera plus perçue en tant que telle. Or, la douleur est une réaction interne totalement subjective, qui n’est pas fournie par l’extérieur

• un objet peut ne pas être caractérisable uniquement par des sensations, qui sont simples et ne fournissent pas de conceptions générales.
Exemple de la couleur
Certaines sensations simples, comme celle de la couleur, sont dites atomiques. Mais en réalité, la couleur n’est pas donnée de façon atomique, c’est une abstraction ; ce n’est pas la couleur que je perçois, mais l’objet auquel elle est attachée.
Note culture : la langue parlée par les Maori, population polynésienne autochtone de Nouvelle-Zélande, comporte 3000 noms pour désigner les couleurs. Ce n’est en effet plus la couleur en tant qu’abstraction qui est nommée, mais la couleur singulière attenante à un objet, comme fournie par cet objet.

Exemple de l’homme
Pour caractériser la race humaine, un travail analytique a été opéré à partir des sensations. En effet, la classification n’est que partiellement fournie par la nature, car aucun humain n’est semblable à un autre.

• tout n’est pas donné par la sensation, il y a montage et intervention de la mémoire.
Exemple du klaxon
Si j’entends un klaxon au loin, je saurai qu’il se trouve une voiture dans cette direction, sans pour autant avoir vu la voiture elle-même, mais grâce à ma mémoire, qui me permet d’opérer le lien entre son du klaxon et voiture.

Exemple d’un incendie
Si j’aperçois au loin la couleur rouge des flammes, il me semblera percevoir la chaleur, et surtout le danger, bien que ces informations ne soient pas implicitement contenues dans la couleur.

LA THEORIE DE LA FORME
Au début du XXème siècle, quatre chercheurs allemands, Ehrenfels, Koffra, Köhler et Krueger élaborent la Gestaltpsychologie.

La perception est la saisie immédiate d’une forme
Il ne s’agit plus ici d’une collection de sensations additionnées, mais de la perception globale d’un ensemble, d’une forme, c’est-à-dire d’une unité d’éléments autonomes, d’un phénomène.
Un peu d’étymologie : Phénomènes < phaïnomaï : ce qui vient à être visible, ce qui apparaît.

Exemple de la mer
Lorsque j’entends la mer, je ne perçois pas séparément le bruit de chaque gouttelette, mais bien le bruit d’ensemble des vagues.

Exemple de la mélodie
Cet exemple est intéressant à plus d’un titre :
- quand j’écoute une mélodie, je n’ai pas la perception des notes une par une, mais celle, globale, de la mélodie, pourtant composée d’éléments sonores indépendants.
- cet exemple est aussi utilisé par Guillaume : « la mélodie peut être transposée dans un autre ton, elle reste pour nous la même mélodie. […] Pourtant, tous ses éléments sont altérés. […]Les sensations correspondant aux sons isolés semblaient constituer la réalité même de la perception; mais la mélodie garde son identité propre quand tous les sons, et pas conséquent toutes les sensations, ont changé d’une certaine façon. […] Le tout est donc une réalité au même titre que les éléments. »
Il y a donc une certaine autonomie du tout, qui vient corroborer la théorie de la forme. Le tout précède les parties, la forme prévaut sur les détails.

Exemple de l’effet Koulechov
L’effet Koulechov, du nom de celui qui l’a mis en évidence Lev Koulechov, un théoricien russe, désigne la propension d’une image à influer sur le sens des images qui l’entourent. Expérience a été faite par Poudovkine, qui prouve cette théorie. Le vissage inexpressif d’un acteur, Mosjoukine, est projeté successivement après l’image d’une assiette de soupe (-> air pensif), d’une femme morte (-> air douloureux), d’une jeune femme alanguie (-> air de convoitise).
Conclusion de Merleau-Ponty (français, 1908-1961) : « Le sens d’une image dépend donc de celles qui la précèdent dans le film, et leur succession crée une réalité nouvelle qui n’est pas la simple somme des éléments employés ».
On voit que c’est la totalité, l’agencement qui fait sens.

Conséquence : la perception est une opération syncrétique
Les sensations ne sont donc pas les seuls acteurs de la perception, elles ne sont que des éléments identifiables seulement après analyse de l’ensemble. La perception est avant tout celle d’un ensemble, d’une forme.
-> Qu’est-ce-qui organise cet ensemble, qui structure nos sensations pour nous faire d’abord percevoir un ensemble ?

THESE RATIONALISTE : LA PERCEPTION EST UNE INTELLECTION
Selon cette thèse, la perception est une intellection, c’est-à-dire une opération de l’esprit.

EXEMPLE DE LA PERCEPTION D’UN MORCEAU DE CIRE
La perception d’un morceau de cire froide appelle à tous mes sens, odeur, goût, toucher… Mais, une fois chauffé, ce morceau perd ses caractéristiques sensibles, tout en restant constitué de cire.
Si je ne me fiais qu’à mes sens, la cire froide ou cette même cire fondue serait deux entités bien distinctes, or la même cire demeure. Je ne peux pas non plus utiliser mon imagination, « cette conception que j’ai de la cire ne s’accomplit pas par la faculté d’imaginer » dit Descartes. En effet, la cire peut prendre une infinité de formes, que mon imagination ne peut pas toutes figurer.

Pour Descartes, il existe une sorte d’essence, de « substance », qui demeure au-delà des modifications physiques et perceptibles. Cette « conception de la cire » ne provient ni des sens ou de l’imagination, mais de la faculté de penser. Finalement, pour Descartes, la perception est une « inspection de l’esprit ». Il tend à prouver que tout part du cogito, que l’approche sensible du monde est incertaine et que prévaut la raison.

On peut néanmoins remarquer que Descartes, s’il aboutit à une conclusion totalement différente de la thèse empiriste, part d’un constat empiriste. En effet, il commence par décrire les différentes sensations qui lui parviennent de ce morceau de cire. Il admet donc l’existence des sensations, comme les empiristes, et la prend pour point de départ. La thèse empiriste ne peut donc être totalement évacuée.

BILAN
Finalement, ni la thèse empiriste, qui réduit la perception à la sensation, ni la thèse rationaliste, qui réduit la perception à l’intellection, ne parviennent à rendre compte de la perception.

SYNTHESE : THESE DE LA PHENOMENOLOGIE
Un peu d’étymologie
Phénoménologie < phaïnomaï=ce qui apparaît + logos : parole, raison, étude.
La phénoménologie étudie la liaison entre l’objet et le sujet, et prouve que les deux sont interdépendants.

CRITIQUE DE LA THESE INTELLECTUALISTE
Les rationalistes comme les empiristes ont commis cette erreur de résolument séparer sensation et travail de l’esprit. La phénoménologie définit au contraire la perception comme la rencontre entre un sujet et un objet, c’est-à-dire la réalité avec laquelle le sujet est en contact. Le sujet intervient dans la perception, de même que l’objet, qui est perçu par et pour une certaine conscience.

La perception n’est donc pas le fait d’un sujet passif qui reçoit des sensations préordonnées, car il y a une traite effectuée par le sujet.
Elle n’est pas non plus un somme de sensations, mais la façon dont elles sont accueillies, c’est une action du sujet.

LA PERCEPTION EST UNE CERTAINE ACTION DU SUJET

LA PERCEPTION OBEIT A UNE INTENTION
Pour Georges Gusdorf (1912-2000), philosophe français, « le vivant aborde son entourage avec des partis pris qui orientent ses démarches ». La perception n’est donc pas assimilable à un enregistrement, elle est commandée et influencée par l’intention su sujet. La perception d’un même élément varie selon l’intention, la disposition interne su sujet.

Vocabulaire intéressant, de Husserl :
La noèse est l’action de perception d’un objet, la façon dont la conscience se rapporte à cet objet.
Le noème est l’objet perçu, visé par cette conscience.

LA PERCEPTION REPOND A DES BESOINS
Bergson voit en la perception une approche utilitariste de notre environnement : « Ce que j’entends et vois du monde extérieur, c’est simplement ce que mes sens en extraient pour éclairer ma conduite ». Il y a donc une subjectivité de la perception en fonction de l’attente, de la disposition du sujet, qui peut être contemplative, utilitariste…

LE FACTEUR « CULTUREL » EST SELECTIF ET HIERARCHISANT
DEF : la culture est tout ce qui relève de la production humaine et non naturelle (il y utilisation de la pensée)
Prenons un exemple : un arbre sera à l’origine des mêmes sensations pour un urbain ou un rural, mais la perception de chacun sera différente, en raison de cultures différentes. L’urbain pourra ainsi y voir une réserve énergétique exploitable, là où les membres d’une tribu primitive pourrait voir l’objet d’un culte, la manifestation d’un esprit.
La culture, notamment le langage, amène à une perception sélective des sensations dans notre environnement.

CONCLUSION
La sensation est une étape, on pourrait dire la base de la perception, mais celle-ci ne se résume pas à elle. Elle résulte d’une élaboration mentale et subjective, sélective, car il y a action du sujet. Celui-ci, par le sens qu’il donnera à ce qu’il perçoit, influe sur la perception. La perception est donc pour part objective, puisqu’elle se fonde sur des sensations qui sont des données externes réelles et non imaginaires, et pour part subjective, car la saisie de ces données varie selon le sujet.
Cécile
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