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La Vérité : cours explicité

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La Vérité : cours explicité Empty La Vérité : cours explicité

Message  Cécile Mer 4 Mai - 17:39

LA VERITE

I.ANALYSE

1) QU’EST-CE-QUE LA VERITE ?
Est vrai ce qui est conforme au réel dans un discours. Une vérité est toujours une proposition vraie, et non la réalité elle-même. Il y a donc un lien intime entre vérité et langage, ce qui n’ira pas sans poser un certain nombre de problèmes.
DEF 1 : la vérité est un rapport de conformité.
Mais à quoi ?

2) QUELS CRITERES POUR ETABLIR LA VALEUR DE VERITE D’UN ENONCE ?

CRITERE 1 : LA CONFORMITE AU REEL
Ce critère découle en quelque sorte de la définition d’une vérité. Je peux m’assurer de la vérité d’un énoncé en le vérifiant effectivement, dans le réel. C’est la formule de Thomas d’Aquin, qui revient à la définition : « Adaequatio rei et intellectus » (adéquation de la chose et de la pensée, conformité parfaite).

CRITERE 2 : LA CONFORMITE AUX REGLES DE LA LOGIQUE
Ce critère assure de la vérité
- Dans certains domaines spécifiques, où la vérification sensible est inutile et où la logique se suffit à elle-même ; il permet alors d’assurer d’un certain vrai, qui n’est pas celui de la conformité au réel (maths par exemple)
- Dans le réel aussi : tout ce qui est contradictoire logiquement est toujours faux dans le réel. Ainsi l’énoncé « il pleut et il ne pleut pas » est toujours faux. Je n’ai pas besoin de le vérifier, mais seulement de lui appliquer le principe de non-contradiction de la logique.

3) QUESTIONS
Est-il possible d’établir une adéquation parfaite entre une réalité (changeante, variable, contingente,) et un énoncé, qui relève du langage (fixe, abstrait, général) ? Plus précisément, du fait du caractère éphémère du réel (il ne pleut qu’un moment), est-il possible de poser une vérité possédant le caractère universel, éternel, nécessaire, qu’on lui associe le plus souvent ?

II. LEQUEL DE CES DEUX CRITERES PEUT DECIDER DE LA VALEUR DE VERITE D’UN ENONCE ?

A.EST VRAI CE QUI EST CONFORME AUX EXIGEANCES RATIONNELLES

1) DESCARTES : CLARTE ET DISTINCTION
Le critère de Descartes, qu’il expose dans ses Principes, est celui de l’évidence intellectuelle, laquelle fait appel à l’intuition du sujet. La raison de celui-ci lui fait discerner dans les idées celles qui sont :
- Claires -> « présent[es] et manifest[es] à un esprit attentif »
- Distinctes -> je ne peux la confondre avec une autre idée

Ainsi, pour Descartes : la vérité n’est pas ce qui est conforme à la réalité, mais ce à quoi la réalité ne peut que être conforme (phrase de Jacqueline Russ, abrégé de philo). De ce fait, « nous n’avons jamais besoin de l’expérience, si ce n’est pour des choses qui ne peuvent se tirer d’une définition. », dit Spinoza, partisan de la thèse cartésienne, dans Lettre à De Vries. On voit donc que, pour Descartes comme pour Spinoza, l’activité du sujet raisonnable et conscient est au centre de la connaissance de la vérité, plus que le réel. Il n’y a pas assujettissement du sujet à son objet. Au contraire, en définissant la vérité comme connaissable par l’expérience de la certitude, Descartes montre le primat du sujet. La certitude, engendrée par l’évidence, est en effet une activité d’un sujet. Notons toutefois une certaine passivité du sujet. Il ne réfléchit pas, ne déduit pas ; sa raison est en quelque sorte passive, se brone à reconnaître l’évidence. Descartes disait d’ailleurs : « Intellectio, passio » -> la vérité s’impose à moi par l’évidence, ne résulte pas d’une construction de mon esprit.

Bilan de Spinoza : « Toute idée claire et distincte est vraie. » (Lettre à Oldenburg)

2) D’OU VIENNENT ALORS LES ERREURS DANS NOS JUGEMENTS ?
S’il suffit à l’entendement du sujet de percevoir l’évidence pour connaître la vérité, comment se fait-il que nous trompions ? Réponse de Descartes (texte 3) : c’est la faute de la volonté, bien plus puissante que la raison (« la volonté étant beaucoup plus ample et plus étendue que l’entendement »). L’homme veut du vrai, il est pressé d’en trouver. C’est alors que sa volonté prend le pas sur sa raison. Plutôt que d’attendre que s’impose l’évidence, il va délibérément, sinon consciemment, se l’imaginer. Si j’accepte d’attendre, si je contrains ma volonté, « si je m’abstiens de donner mon jugement sur une chose, lorsque je ne la conçois pas avec assez de clarté et de distinction, il est évident que je ne me suis point trompé. Mais si je me détermine (-> action de la volonté) à la nier (c’est faux), ou assurer (c’est vrai), alors je ne me sers plus comme je dois de mon libre arbitre. Et c’est dans ce mauvais usage du libre arbitre que se rencontre la privation que constitue la forme de l’erreur ».

3) LIMITE : SUBJECTIVITE DE L’EVIDENCE
Faille 1 : dans ce critère qui met au moins partiellement en jeu les principes de la cohérence logique, problème de la relation au réel.
Faille 2 : Leibniz, pour lequel le critère de la vérité d’un énoncé est sa cohérence logique, a mis en lumière la faille de la thèse cartésienne. La vérité se veut universelle ; or, la certitude d’un sujet lui est propre, et il l’établit en fonction de sa propre subjectivité. C’est peut-être dans la réalité que va se trouver ce caractère universel.

B. C’EST LA REALITE QUI GARANTIT LA VERITE D’UN ENONCE

1) CRITERE DE REALITE PLUTOT QUE DE NECESSITE
Rappel : pour les empiristes, l’esprit humain est une « Table rase » (Locke) où il n’y a nulle idée innée. Les idées su sujet proviennent subséquemment de l’expérience ; celle-çi, à force de sensations d’un même type, imprime en moi des idées.

Ici : Descartes a fait jouer la nécessité d’une proposition évidente ; la réalité ne peut pas être autrement que cela. Mais les empiristes répondent que nécessité n’est pas réalité. La nécessité relève de la logique, de preuves formelles : c’est une invention de l’esprit. La réalité est ce qui est véritablement, matériellement, quoique de façon contingente ; il faut donc en faire le centre de gravité de la vérité. C’est d’ailleurs bien pour cela les sciences ne peuvent se passer de l’expérimentation. La vérité sera donc ce qui est validé par l’expérience. Plus encore, c’est d’une certaine façon l’expérience qui crée la vérité ; de même qu’on avait chez Descartes la pression de l’évidence intellectuelle, on a chez les empiristes la pression de la réalité sensible.

2) LIMITES
On ne résout pas le problème ; ce critère de la réalité sensible ne permet pas non plus d’affirmer le caractère universel, éternel et nécessaire d’une vérité puisque la réalité est spécifique, éphémère et contingente.

C. SYNTHESE (KANT)

1) THESE : DIFFERENCE REEL/REALITE
Kant opère une distinction entre réalité et réel. Il explique que le sujet, biaisé par ses formes cognitives et perceptives spécifiques, n’a qu’un accès déformé au réel. De ce fait, le réel, ou chose en soi, est inconnaissable. J’ai uniquement accès à une réalité faite de phénomènes.
DEF : un phénomène (<phainomai : apparaître) est ce qui nous apparaît du réel après une opération de mise en forme.
NB : Cette situation, commune à tous les individus – qui sont enfermés dans une « cage de verre », est exacerbée dans le cas de la science. Celle-ci, en effet, mathématise à fond la réalité, en donne exclusivement une vue abstraite à laquelle elle ne se résume pas.

2) CONSEQUENCE : Ø ADEQUATION ABSOLUE POSSIBLE -> RELATIVITE DE LA VERITE
Je n’ai pas accès au réel : il ne peut donc y avoir de véritable adéquation (ou par hasard…) entre un énoncé et ce réel. Il n’y a donc pas de vérité absolue.
Je n’ai accès qu’à une réalité relative à mes formes de perception : la vérité est donc une notion relative -> il n’y a pas une vérité, mais des vérités. D’autres philosophes ont renforcé cette idée -> III.

III. LA VERITE COMME ADEQUATION, UNE ILLUSION

A.NIETZSCHE : Ø VERITE POSSIBLE COMME ADEQUATION, CAR REEL TOUJOURS EN DEVENIR

1) THESE DE PLATON, QUE REFUTE NIETZSCHE
Pour Platon, comme il l’exprime par la « voix » de Socrate dans Phédon, on ne peut trouver de vérité dans les réalités sensibles. Celles-ci éblouissent, aveugles : les sens sont impuissants à discerner le vrai dans la masse confuse du réel. Il faut donc « recourir aux principes et regarder en eux la vérité des choses », c’est-à-dire bâtir des concepts, rationnelles, et donc accessibles à ma raison et à mon langage, pour évaluer le réel et y déterminer les parts de vérité. De là provient la domination de l’idée sur le réel et la définition de la vérité comme adéquation dans la philosophie classique.

2) THESE DE NIETZSCHE : REEL = DEVENIR
Comme Héraclite au –VIè (« On ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve »), Nietzsche est un philosophe du devenir : le réel est en constante transformation. De ce fait, la vérité définie comme l’adéquation entre un énoncé (fixe, de par la nature même du langage) et ce réel toujours changeant, est impossible. Il n’y a pas de vérité, c’est une illusion de l’homme.
NB : une illusion diffère de l’erreur en ce sens qu’elle est maintenue de façon délibérée -> Pourquoi ?

B. POURQUOI L’HOMME MAINTIENT-IL LA FICTION DE L'EXISTENCE D’UNE VERITE ABSOLUE ?

1) POUR SE RECONFORTER -> UTILITE MORALE
Nietzsche l’explique lui-même dans La volonté de puissance : « la contradiction, l’illusion, le changement sont cause de souffrance ». L’homme n’aime pas l’infixité, il a besoin de repères stables et assurés, ou du moins de l’espoir de pouvoir trouver de tels repères : « l’homme cherche la « vérité » : un monde qui ne puisse ni se contredire, no tromper, ni changer, un monde vrai […] : la volonté de trouver le vrai n’est que l’aspiration à un monde du permanent ».

2) PARCE QU’ELLE PEUT SATISFAIRE DES BESOINS PRATIQUES -> UTILITE PRATIQUE
James, auteur de Le pragmatisme, explique que la quête réel de l’homme n’est pas de « la vérité », mais de « vérités ». Ces vérités, « idées directrices », peuvent être extrêmement variées, mais elles ont « pour caractère commun d’être, toutes, des idées qui paient ». Elles paient techniquement, en s’incarnant dans des outils technologiques pour les vérités scientifiques, mais surtout intellectuellement. Elles confortent en effet l’homme dans sa domination sur le monde. De ce fait, « la vérité est une chose qui se fait », et « le vrai consiste simplement dans ce qui est avantageux pour notre pensée ».

Transition : les théories de Kant et de Nietzsche montrent qu’il n’y a pas de vérités absolues si on définit la vérité comme une adéquation. Mais le relativisme de la vérité qui en découle paraît innacceptable philosophiquement, car on rentre alors dans le sophisme, qui veut qu’il y ait autant de vérités que d’individus. Comme faire ?

IV. SOLUTION POSSIBLE : D’AUTRES DEFINITIONS DE LA VERITE

A.HEIDEGGER : LA VERITE RESIDE DANS LA DISPOSITION DU SUJET

1) THESE : DISTINGUER LA VERITE DU SAVOIR
Dans De l’essence de la vérité, Heidegger (1889-1976) commence par reprendre « la définition traditionnelle de la vérité », comme adéquation.
1. Il montre d’abord « le double caractère de l’accord », de conformité, qui perce sous la définition :
- « accord entre la chose et ce qui est présumé d’elle » : on escompte que ce que l’on perçoit de la chose soit bien conforme à la chose elle-même (pas comme Kant)
- « concordance entre ce qui est signifié par l’énoncé et la chose » (normal quoi)
2. Il redéfinit ensuite l’adéquation : « l’essence de l’adéquation se détermine plutôt comme la nature de la relation qui règne entre l’énoncé et la chose »
3. Il souligne enfin l’importance d’un certain comportement à l’origine de l’établissement de cette adéquation : « [Cette relation] se réalise originellement chaque fois comme la mise en branle d’un comportement ».

C’est alors qu’il opère sa transition vers sa thèse. Il effectue en fait un renversement de centre : la vérité ne réside plus dans le jugement (un énoncé vrai), mais dans le comportement : « ce qui rend possible la conformité (-> le bon comportement) possède un droit plus originel d’être considéré comme l’essence de la vérité au jugement.[…] la vérité n’a pas sa résidence originelle dans le jugement ». Ce n’est pas dans le savoir établi que se trouve la vérité, mais dans le comportement, la disposition d’esprit initiale qui a permis l’établissement de ce savoir.
[justify]
2) EXEMPLES

L’EXPERIENCE DU DOUTE DE DESCARTES
Après avoir remis en doute les informations fournis par ses sens, potentiellement trompeurs, Descartes remet en doute les savoirs acquis, les résultats des raisonnements. Il est pile poil dans une disposition d’ouverture au nouveau, souhaitant l’émergence d’une vérité, même seulement sceptique (-> je suis sûr sur rien n’est sûr).

LA CURE ANALYTIQUE DE FREUD
Double « abandon au dévoilement de l’étant » dans la démarche de Freud, double prise de « liberté » (Heidegger):
- par rapport aux propos du patient : par la talking cure, Freud recherche de la vérité (-> les causes véritables des troubles du patient) dans le discours de son patient. Toutefois, il ne s’intéresse pas aux mots eux-mêmes, qui se rapportent aux savoirs du patient dont il est en mesure de parler de façon ordonnée, mais aux défaillances du discours, qui révèle précisément le non su.
- par rapport à sa propre théorie, à ses propres savoirs établis, qu’il accepte de remanier, rectifier (il l’a fait tout au long de sa vie)
=> Vérité ≠ savoir. Un savoir est exact ou inexact, il n’est pas vrai ou faux. La vérité se situe au-delà de ce seul critère de conformité, elle réside dans la démarche, non dans l’énoncé.

B. HEGEL : LA VERITE EST UN PROCESSUS
Dans notre extrait (texte 7), comme Heidegger, Hegel commence par examiner « la manière commune de penser ». Il considère les systèmes philosophiques, et fait ce constat : on observe généralement ces systèmes comme alignés les uns par rapport aux autres, en vérifiant si les thèses sont concordantes ou contradictoires. C’est une vision figée de la philo, on recherche de l’adéquation logique entre des systèmes comme posés les uns à côté des autres.
Pour Hegel, il faut bien plutôt concevoir « la diversité des systèmes philosophiques comme le développement progressif de la vérité », les intégrer dans un mouvement. Il illustre ce mouvement de vérité par l’image de la fructification d’une plante, en 3 moments :
1. Le bouton germe
2. La fleur vient remplacer le bourgeon, le « réfut[e] » d’une certaine façon, car il y a une sorte de contradiction naturelle entre ces deux éléments, qui ne peuvent coexister.
3. Le fruit remplace la fleur, et la « dénonc[e] comme un faux être-là », il la nie comme la fleur a nié le bouton : « le fruit s’introduit à la place de la fleur comme sa vérité »
Dans ce processus, le bouton et la fleur ne constituent que des phases transitoires ; seul le fruit est essentiel, c’est là tout le but de la plante. Et pourtant, bouton et fleur étaient indispensables ; le fruit n’aurait jamais pu exister sans eux, et ce bien qu’ils soient « mutuellement incompatibles ». Ils sont en fait rapprochés par leur « nature fluide », c’est-à-dire inscrite dans un mouvement, qui « en fait des moments de l’unité organique dans laquelle [ces formes] ne se repoussent pas seulement, mais dans laquelle l’une est aussi nécessaire que l’autre, et cette égale nécessité constitue seule la vie du tout ».

C’est précisément la même chose en philo. Chaque système, bien qu’il soit peut-être en contradiction avec son contemporain/prédécesseur/suiveur, fait partie d’un tout, s’inscrit dans un mouvement. Il n’y aurait pas eu d’empiristes sans les rationalistes, et inversement, et pas de Kant sans ces deux doctrines. Et comme toujours avec Hegel, la contradiction est motrice de ce mouvement. Et c’est dans ce mouvement que réside la vérité. De plus, il existe bien selon Hegel une vérité absolue, qui adviendra à la fin des temps, lorsque la dialectique aura abouti.
DEF 3 : la vérité est présente dans un processus sous-jacent à toute réflexion humaine, qui conduit ultimement les hommes vers la vérité.

CONCLUSION
La définition classique de la vérité comme adéquation absolue entre pensée et réel est niée par Kant, qui montre que la seule conformité possible est celle à des phénomènes. Il n’y a donc, au mieux, que deS vérités. On peut cependant maintenir la catégorie de vérité en lui donnant une autre définition : non plus rapport, mais comportement (Heidegger) ou processus (Hegel). Ce débat est encore à l’œuvre aujourd’hui : certains penseurs modernes, comme Deleuze, estimant que la vérité reste une complète illusion.


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Message  Cécile Mer 4 Mai - 18:23

Coucou ! Voila la vérité (éhé, on aimerait pouvoir dire ça tous les jours), mais je m'excuse d'avance pour toutes les fautes de frappes, imprécisions, complications inutiles que vous pourrez trouver dedans, surtout vers la fin Embarassed , d'habitude j'essaye de corriger tout ça avant de mettre sur le site, mais là... Ca urge !
Gros bisous ! Very Happy
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